S’asseoir sur un coussin de méditation, sans raison
La méditation est devenue un sujet top tendance. Certes, elle est détrônée depuis quelque temps par l’affaire Fillon, mais il y a fort à parier que Pénélope ne restera pas reine bien longtemps, et que le coussin de méditation redeviendra trône d’ici peu. C’est qu’il s’agit d’une tendance de fond ! Et, pour appâter le lecteur, les articles des magazines lui promettent monts et merveilles : avec la méditation, vous allez vous libérer du stress, tomber dans les bras de Morphée à peine couché, arrêter de jurer (p&à§grrr#of[@ !!!) quand un chauffard vous fait une queue de poisson, supporter votre chef insupportable, gagner plus d’années (et dépenser moins d’argent) qu’avec des injections de Botox, vous alléger des kilos-capitons de l’hiver…
Mais n’est-ce pas là perdre de vue où sont les vraies merveilles que l’on découvre au fil de la pratique ?
Des coquelicots sous mon coussin de méditation
Le coussin de méditation peut-il vraiment être le dépositaire de tant d’attentes ? Il y a là une terrible méprise. Enfermer la pratique dans cette perspective utilitaire, c’est la réduire à une technique de plus pour être plus ceci ou moins cela. C’est donc chercher une nouvelle performance, tendre vers une nouvelle perfection. C’est s’imposer une nouvelle forme de pression. L’attente porte en germe la déception et la frustration, sans compter la tension qu’elle génère. En s’engageant ainsi dans la pratique de la pleine conscience, on perd de vue l’essentiel.
Ce que les magazines ne nous disent pas (ou rarement), c’est que sur ce chemin, il n’y a pas de destination, pas d’objectifs. Et si on y rencontre des fleurs, elles sont là par surcroît. Si nous cherchons avec acharnement un coquelicot, assurément nous ne le trouverons pas. Il restera caché sous le poids de notre attente. Mais si nous entamons notre promenade avec pour seule intention de marcher, d’ouvrir le yeux, et d’accueillir ce qui se présentera sur le chemin, alors nous avons toutes les chances de rencontrer des fleurs – et peut-être même des coquelicots !
S’asseoir et surseoir à toute attente
Méditer est un acte subversif : s’asseoir et ne rien faire, à contretemps de ce mouvement qui nous emporte dans une course folle. Est-ce cette course, ou moi, qui deviens folle, à rester là, assise sur mon coussin de méditation, sans raison ? Sans raison, mais pas sans intention. Mon intention, elle tient presque d’une révolution. Une révolution silencieuse. Je décide de ne plus me laisser ballotter par la vie, mais de me balancer sur son mouvement : subir ou choisir.
Je sens bien qu’il y a en moi un cœur tendre apeuré, qui a besoin d’un espace sacré pour accepter sa vulnérabilité. Alors, les bénéfices marketing de la mindfulness lui paraissent bien futiles, quand il aspire essentiellement à exprimer son humanité.
Au fil du temps, ce précieux temps passé sur mon coussin de méditation, des fleurs apparaissent. Ces fleurs sont délicates, discrètes. Puis, pour peu que je les voie et les arrose, elles prennent de la vigueur. Je me sens plus confiante dans la vie, mon impatience s’étiole (est-ce vraiment « mon » impatience ?), les émotions comme la peur ou la tristesse qui émergent me perturbent moins, je me sens plus reliée aux autres, je m’émerveille d’un rien…
Tous ces dons, reçus sans raison, sont les fruits de la pratique. Ils colorent chaque instant. Et si, ma foi, par surcroît, je suis plus performante, plus créative, plus calme, plus…. Je prends aussi les cadeaux bonus, en plus !